5 décembre 2012 3 05 /12 /décembre /2012 23:25

 


                           La découverte d'un grand romancier
         
           C'est en discutant avec mon frangin que j'ai découvert George P. Pelecanos. La façon dont il m'avait raconté "Hard revolution", m'avait donné non seulement une sacrée envie de lire le roman, mais aussi le désir profond d'en savoir plus sur le personnage qui en était l'auteur. On nous présente habituellement la ville de Washington comme uniquement la capitale des Etats-Unis et le siège de la Maison Blanche, oubliant de préciser que c'est un des endroits les plus violent d'Amérique. Les inégalités y sont d'autant plus frappantes que l'on peut y voir se côtoyer le siège du pouvoir le plus puissant de la planète et les ghettos les plus sordides. Pelecanos a grandi du coté noir de la ville. Il la connaît sur le bout des doigts, il l'a arpentée de long en large, jusqu'au plus perdu des terrains vagues. Fils d'émigrés grecs, il a vécu son enfance, coincé entre les blacks qui faisaient de lui un sale petit blanc et ces petits blancs justement qui lui renvoyaient l'image d'un basané. George est aussi un observateur, peu bavard, un peu taciturne. Il emmagasine les images, les digère et enfin les restitue à travers ses romans à l'image d'un Martin Scorsese au cinéma ou d'un Bruce Springsteen dans la chanson.



          Pelecanos aime les gens cela se sent, il aime ses personnages, et s'il fait preuve à leur égard d'une grande sensibilité, on ne perçoit pas chez lui la moindre tentation de verser dans le politiquement correct. Ses personnages sont à l'image de l'être humain, jamais totalement bon, ni totalement mauvais. Héros du quotidien ou pauvres bougres tournant mal, tous tentent de vivre ou de survivre dans ce monde ou chaque geste n'est jamais anodin. Les romans de George P. Pelecanos sont avant tout des peintures sociales de la société américaine. Bien plus que de vrais polars, ce sont des oeuvres romanesques dont le souffle puissant nous transporte littéralement. En lisant Hard revolution, j'ai partagé la vie de ces petites gens, ceux que l'on montre à la télévision lorsqu'ils sont victimes ou bourreaux, quand ils brûlent des voitures ou sont tués lors d'un cambriolage. En somme de simples histoires individuelles qui se fondent admirablement dans la trame de la grande histoire d'un pays.


          Avec Hard Revolution, George P. Pelecanos nous fait revivre une période clé de l'histoire contemporaine des Etats-Unis, de 1958 à 1968 en passant par la guerre du Vietnam et les profondes blessures qu'elle engendre, jusqu'à l'assassinat de Martin Luther King qui déclenche l'embrasement de la capitale. Son talent, son sens du détail, du portrait et des dialogues, son regard critique mais aussi profondément humain, ses nombreuses références musicales et cinématographiques réussissent à faire ressurgir toute l'ambiance électrique de cette époque. Sans manichéisme, il dresse le portrait des habitants des quartiers populaires de Washington, et met en parallèle le quotidien de groupes de jeunes blancs et de jeunes noirs, donnant vie à des personnages attachants criants de vérité, et apporte un éclairage sur l'enfance, l'adolescence et les débuts de flic de son privé Derek Strange. Ce récit particulièrement dense vous prend aux tripes, son réalisme est saisissant, poignant et chargé d'émotions. Alors, même si vous n'êtes pas amateur de polars, laissez vous tenter par la lecture de Hard revolution et vous verrez, que tout comme moi, vous vous laisserez happer par sa puissance évocatrice.  
  

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